Le vol de données ou d’informations en Cote d’Ivoire : Mythe ou réalité??
Pour commencer, que doit-on entendre par vol ? C’est quoi une donnée ou une information ?
Le vol se définit au sens juridique du terme comme le fait de soustraire ou prendre frauduleusement une chose qui ne vous appartient pas. C’est la définition qui ressort de l’article 392 du Code Pénal ivoirien.
Une donnée quant à elle est la représentation d’une information sous une forme conventionnelle destinée à faciliter son traitement. Par information nous voulons designer ici la connaissance, les renseignements que l’on donne à une personne. En général, ces informations et données sont transmises par voies orales, sur support papier ou numérique. Ainsi en dehors du support, ce sont des éléments immatériels, qu’on ne peut toucher, qu’on ne peut prendre. (Les fichiers qui sont contenus dans un ordinateur…)
Dès lors, peut-on au sens juridique du terme voler des biens immatériels c’est-à-dire qu’on ne peut toucher ?
Si l’on se base sur la définition classique du vol qui est la soustraction frauduleuse de la chose d’autrui cela pose un problème. Car en droit, lorsqu’on parle de chose, on fait allusion à des biens matériels, qu’on peut toucher (un livre, une télévision, un ordinateur, une voiture…)
De même on parle de soustraction ce qui signifie une dépossession de la chose des mains de son propriétaire. Or à l’heure actuelle ou la technologie est en plein essor, il est possible de s’introduire dans un système d’informations et de copier des données frauduleusement sans pour autant que le véritable propriétaire en soit dépossédé ou même qu’il s’en rende compte.
La définition classique du vol pose donc un problème dans la qualification de vol d’information car le législateur n’avait pas pris en compte les nouvelles formes d’infractions dans cette définition.
Jusqu’à lors, en Cote d’Ivoire, tous ceux qui intentaient des procès se fondant sur l’infraction de vol d’informations ou de données se voyaient déboutés de leurs demandes ou perdaient leurs procès. Car dans l’esprit du législateur d’antan, il était inadmissible de parler de vol pour ce qui concerne les éléments qu’on ne peut toucher. De plus lorsque le hacker s’introduit dans un système d’information, copie simplement les données, il n’y a guère dépossession. On ne pouvait donc retenir ici l’infraction de ‘‘vol’’ pour ce qui concernait l’information, ou les données.
C’était donc une joie pour les délinquants qui commettaient ce genre d’infractions de savoir qu’on ne pouvait les poursuivre sur la base de l’article 392 du Code Pénal…
Fort heureusement, depuis 2013 le législateur est intervenu pour rétablir l’ordre avec une disposition spéciale. Ainsi, dans la Loi n° 2013-451 du 19 Juin 2013 relative à la lutte contre la cybercriminalité le législateur ivoirien va consacrer le vol d’information pour faire cesser cette situation manifestement injuste.
Cela dit, LE VOL D’INFORMATIONS OU DE DONNÉES est constitué selon les termes de l’alinéa 1 de l’article 26 de la loi sur la cybercriminalité, à partir du moment ou une personne « prend frauduleusement connaissance d’une information à l’intérieur d’un système électronique ou copie frauduleusement une information à partir d’un tel système, ou encore soustrait frauduleusement le support physique sur lequel se trouve une information ».
En clair, un salarié par exemple qui sans l’autorisation de ses supérieurs prend connaissance des informations affichés sur l’ordinateur de son employeur (les copie, les photographie…) est coupable de vol d’information. De même, un hacker qui copie frauduleusement des informations contenues sur un support informatique comme un ordinateur, une clé USB, un système d’informations …, se rend coupable de vol tout comme celui qui soustrait frauduleusement le support qui contient l’information en question. Il n’y a donc désormais plus d’impunité pour quiconque se procure frauduleusement des données immatérielles.
Il faut toutefois souligner que sur le plan international et doctrinal, la qualification de « Vol » de biens immatériels n’est toujours pas admise par certaines législations et certains juristes pour les raisons que nous avons énoncées plus haut.
Pour ce qui concerne la Cote d’Ivoire, retenons qu’il n’y a plus de doutes pour ce qui concerne cette notion car le législateur a été clair et précis.
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Ange Uriel Kouassi, JurisTIC-CI